Lettre Y : Yser (rue de l')

Ce que nous enseignent les noms de rues

De mes années de guide-conférencière, j'ai gardé une habitude, celle de parcourir une ville le nez en l'air !

Non, je ne regarde pas défiler les nuages mais les plaques de rues. Ces fameuses plaques bleues nous racontent toute une histoire... même si la plus part du temps on en a oublié le sens premier.

Aujourd'hui, je vous emmène à ma suite dans les rues de Metz, ma ville de « cœur » et celle de bon nombre de mes ancêtres.


J'usqu'au XVIIe siècle environ, les noms de rue étaient exclusivement définis par les habitants eux-mêmes, loin d'être anodins, ils constituent la mémoire d'une ville, témoignent de son histoire comme de son esprit (l'humour y a souvent sa part): paysages, activités économiques, vie culturelle et politique... Bien souvent elles nous racontent nos ancêtres.


En voici une évocation non-exhaustive...

Les métiers

rue des Parmentiers
rue des Parmentiers
rue Taison
rue Taison


Les auberges et hôtels


TÉTE-D'OR (rue de la), de la rue du Petit-Paris à la place Saint-Louis.

Son nom lui vient de l'hôtellerie de la Tête d'Or. Cet établissement, brillant par l'ancienneté et par la renommée, existait déjà au XIVè siècle à l'emplacement de la maison numéro 14. Au cours du XVlllè siècle, nous retrouvons cette hôtellerie sous l'enseigne Au Grand Saint-Christophe. En 1806, elle reprit le nom de rue de la Vieille Intendance pour redevenir quelques années plus tard la rue de la Tête d'Or.

GRAND-CERF (rue du), de Chaplerue aux places du Quarteau et Saint-Louis.

Sa dénomination lui vient de l'hôtellerie du Grand-Cerf, sise à l'emplacement de l'actuelle maison numéro 15. Au début du XIXè siècle, l'établissement existait encore sous l'enseigne d'Hôtel de France, tenu en 1800 par un sieur Levasseur. Cette année-là, l'hôte annonçait la vente d'un excellent vin de pays à 45 centimes la bouteille. L'hôtel de France disparut vers 1824.

PARMENTIERS (rue des), de la rue de la Chèvre à la place Saint-Martin.

Elle portait déjà cette dénomination en 1456. Elle abritait les parmentiers ou tailleurs d'habits. Un vieux titre de l'évêché dit que » le seigneur evesque doit toujours avoir avec lui son parmentier pour faire écoudre ses robbes ».

PETITE-BOUCHERIE (rue de la ), du bas de Fournirue à la rue du Pont-Sailly.

Un arrêt du Parlement de Metz, en date du 28 novembre 1753, fixa dans la ville six endroits où les bouchers pouvaient exercer librement leur profession. Cette rue était le troisième des six endroits déterminés par l'arrêté.

CHANGE (rue du), de Fournirue à la place Saint-Louis.

Dans cette rue, ainsi que sous les arcades de la place du Change (actuelle place Saint-Louis), plus de soixante changeurs se livraient au commerce et au change de l'argent derrière leurs tables où s'empilaient florins, tournois et toutes sortes de monnaies étrangères,. Cette industrie devint au Moyen Age une des principales sources de prospérité de la république messine.

CHAPLERUE (en)

Ce nom apparaît au XIIIe siècle et pourrait provenir des chapeliers installés jadis dans cette rue, ou bien encore de la présence des chapelles Petit Clairvaux et Saint-Esprit. C'est entre les deux chapelles que se trouvait la grange du Saint-Esprit, bâtie au XVe siècle. Cette grange était, au Moyen Age, un des grands greniers à blé de Metz.

FOURNIRUE (en), de la place d'Armes à celle des Paraiges.

c'était une des rues les mieux achalandées, les mieux fournies en objets destinés à l'usage guerrier. Pour d'autres, elle rappelle des fourneaux utilisés par les orfèvres et les forgerons installés dans cette rue au Moyen Age.

rue du Grand Cerf
rue du Grand Cerf
rue de la Tête d'or
rue de la Tête d'or


Les anecdotes

NEXIRUE (en), de la rue du Palais à la rue Poncelet.

Le nom de Nexirue est un nom dérivé du mot latin Nexere ou Nexare, qui signifie faire mourir ou donner la mort. Entre cette rue et celle des Clercs existait jadis une petite place où se faisaient les exécutions criminelles.

PARADIS (rue du), de la rue des Capucins à la rue Saulnerie.

Certains prétendent que c'était l'ancien Chemin du Paradis, c'est-à-dire la voie conduisant au parvis. Le mot paradisius désignant le porche ou le cloître à l'entrée d'une église. D'autres voient dans cette dénomination un dérivé de via supérior, nom attribué à cette voie par opposition à la rue d'Enfer, dite autrefois via inferior.

Pont des Morts
Pont des Morts


L'histoire

SERPENOISE (rue), de la rue de Ladoucette à l'avenue Robert-Schuman.

C'était la via scarponensis, voie romaine de Metz à Reims. Elle sortait de la ville par la porte de Scarpone ou porte scarponaise. Scarpone, première station sur la route, se situait près de l'actuelle localité de Dieulouard. Par corruption, le mot scarponaise ou scarponoise devint Serpenoise.

JURUE (en), de la place Sainte-Croix au bas de Fournirue.

il semble que le mot Jurue soit une contraction de Jupiter-rue. Cette voie conduisait en effet au temple gallo-romain de Jupiter qui, selon la tradition, dressait ses magnifiques colonnades à l'emplacement actuel de la place Sainte-Croix.

Mais Jurue résulte de Juifs rue Juifrue est déjà constaté au XVIe siècle et rue des juifs en 1793. On trouve à proximité des vestiges de la plus ancienne synagogue de Metz, rue d'Enfer, ainsi qu'une importante communauté juive qui s'installe dans le quartier.

Au bas de cette rue reste la terrasse du café Mathis. Au fond du jardin on y trouve un ancien hôtel particulier gothique du XIIe siècle, l'ordre de Malte récupère la propriété en 1565 et y aménage la chapelle Saint-Genest.

PONT-DES-MORTS (rue du), du pont des Morts.

De ce pont on précipitait dans la Moselle les criminels condamnés à la noyade. Une autre interprétation est possible : on l'appelle pont des Morts à la suite d'une charte d'un évêque de Metz datant du 8 mars 1222 qui établit que toute personne venant à décéder devait donner son meilleur habit à l'hôpital Saint-Nicolas, qui avait construit le pont et devait l'entretenir. Cette explication est contestée : certains prétendent que le vieux pont en bois portait déjà le même nom.

ENFER (rue d'), de la rue de l'Abbé-Risse à Jurue.

La rue d'Enfer est aujourd'hui une rue bien tranquille. « II n'en était pas de même au XVIè siècle : truands, ribaudes, ménestrels, gens sans aveu, ni foi ni loi, menaient vacarme dans cette rue étroite, et des grilles qu'on fermait tous les soirs, à la brune, les empêchaient de courir la ville et d'inquiéter les bourgeois. Le moyen âge n'avait pas trop d'admiration pour les baladins ; il les reléguait dans les bas-quartiers avec les juifs et autres parias.

en Jurue
en Jurue

Les régionalismes et les patronymes

place Saint Louis
place Saint Louis



Et pour finir, la rue de L'Yser, juste là pour me fournir le Y !

(Mais pour les curieux, probablement en la mémoire de la bataille de l'Yser ayant eu lieu du 14 au 31 octobre 1914.)


Source : Vieux Metz le nom des rues par André Jeanmaire (édition J.-S. ZALC )

GRAND-WAD (rue du), de la rue Mazelle au boulevard André-Maginot.

Il existe deux hypothèses concernant l'origine du nom Wad. La première voudrait qu'il vienne de l'ancien mot Warde qui signifiait garde. Warde serait issu de l'allemand Wacht : garde, sentinelle. Dans les vieux titres, la rue de la Garde est dite rue du Warde. La proximité de l'ancien rempart des Allemands pourrait corroborer cette hypothèse. Mais Wad peut dériver aussi du latin vadum, qui veut dire gué, gué sur la Seille proche.

WAD-BOUTON (rue du), de la rue Mazelle au boulevard André-Maginot.

Des actes de 1386, 1514, 1531 et 1630 citent la rue du Waide-Bouton. Bouton, comme Billy, était un nom patronymique assez répandu dans l'ancienne bourgeoisie messine. Des orfèvres, des horlogers, des ébénistes le portèrent.

WAD-BILLY (rue du), de la rue Mazelle au boulevard André-Maginot.

Billy est un nom patronymique messin. Des bans de tréfonds du Xllle siècle mentionnent les noms de Bugle. Bugley et Bugly. Bugley ou Bugly, se prononçait Bully ou Billy. Un Jehan Bugley exerçait au XIV° siècle le métier de changeur. Il fut inhumé à Saint-Clément. Sa soeur, Marguerite Bugley, épousa Joffroy Sollate, également changeur, dont l'épitaphe existait dans l'église Saint-Simplice. Le fils de Jehan Bugley le changeur, Jehan Bugley le prêtre, possédait son tombeau dans l'église du Petit-Clairvaux, en Chaplerue. Thiébault Bugley fut maître-échevin en 1355. Sur un plan de 1738, la rue du Wad-Billy est appelée rue derrière le Loup, parce qu'elle donnait sur l'arrière de l'hôtellerie Au loup, sise au numéro 53 de la rue des Allemands.

Maison des Têtes
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