Lettre T : tegame e padelle

... à la table de nos ancêtres.


Mais que mangeaient nos aïeux italiens ?

Vu de l'étranger, la cuisine italienne se résume la plus part du temps à pizza et spaghetti à la bolognese. Par contre, si vous avez des origines italiennes, ou de la curiosité, vous avez eu la chance de découvrir toute la diversité de la gastronomie et de la cuisine familiale italienne, l'identité régionale y est très affirmée, beaucoup plus qu'en France.

Rien que pour la « pasta » on en trouve plus de 150 variétés dont beaucoup sont représentatives d'une région d'Italie : les pici en Toscane, les busiate dans la région de Trapani , les bavette autour de Gênes, pour ne citer qu'elles.

Et que dire de la fameuse « sauce tomate » autrement dit sugo, ragù, pomarolla et leurs dérivés ? La tomate ne fait son apparition en Italie qu'au début du XVIIème siècle et son utilisation en cuisine ne se développera réellement qu'au courant du XVIIIème !

Alors de quoi se nourrissaient nos ancêtres italiens ?

L'alimentation est intimement liée au niveau social, à l'époque et aux lieux de vie. Même l'histoire y joue un rôle , la volonté de diffuser des plats « nationaux » afin d'unir l'Italie fragmentée après l'unification en 1861 en est un exemple.

Repas étrusque
Repas étrusque
Mets Empire romain
Mets Empire romain

Moyen-âge et Rinascimento

Les invasions arabes en Sicile, vers 824, vont apporter avec elles des aliments jusqu'alors méconnus : les épinards, l'aubergine, les agrumes,la pastèque, les pâtes, le riz et la canne à sucre, etc.

La culture arabe revisite la tradition romaine. Le goût pour l'aigre-doux typique du monde romain se renforce, le vinaigre et le miel sont maintenant remplacés par les agrumes et le sucre de canne. Inutile de dire que cela touche, dans un premier temps, surtout les classes aisées de même que l'utilisation des épices, de part leur cherté, sont symboles de prestige et richesse.

Le début de la faim

Un tournant s'amorce à partir du 11ème siècle jusqu'au 15ème siècle : avec la croissance démographique se développe l'agriculture au détriment des zones incultes, des forêts sont détruites pour être cultivées ou réservées aux seigneurs locaux pour la chasse.

Les aristocrates poussent les paysans à produire un surplus de produits qu'ils peuvent vendre sur les marchés de la ville. Le fossé entre campagne et ville se creuse, tout comme celui dans l'alimentation entre les différentes classes sociales.
Les paysans ne peuvent plus chasser, faire paître le bétail, ni cueillir des fruits sur des terres qui ne sont plus libres et leur régime alimentaire se limite aux céréales, légumes et légumes.secs.

Les protéines animales redeviennent celles du porc, consommé sous forme de viande salée, de lard ou de saucisse, tandis que la volaille est utilisée pour produire des œufs et mangé uniquement lors d'occasions spéciales. Même le fromage devient rare si ce n'est dans les régions montagneuses.
Apparaissent aussi les pâtes sèches, d'abord en Sicile puis à Naples et en Ligurie.

A La Renaissance, Il n'y a pas de changements majeurs dans l'alimentation des classes inférieures, qui continuent à consommer du pain noir, légumes, herbes, légumes secs, rarement de la viande et du poisson, parfois des œufs.

Dans les cuisines sont encore préparés pour les familles pauvres de grands chaudrons de soupes d'oignons, fèves, choux, herbes, avec un peu de lard ou d'huile ou de la panate, des morceaux de pain cuits à feu doux avec de l'eau, du bacon et des légumes, et les jours de fête, des galettes . Tout ça avec du vin de mauvaise qualité.


Étrusques et romains

Si votre arbres remonte jusqu'à l'empire romain (chute vers476 ap, JC) voir aux étrusques ( 9ème au au 1er siècle av. JC)- on ne sait jamais- ou au Rinascimento (fin 14ème à début 16ème siècle)-pourquoi pas-, voici de quoi se nourissaient les italiens de ces temps reculés :

Les étrusques et les romains étaient essentiellement végétariens, leur ordinaire était composé de céréales (blé, épeautre, orge, millet) transformées en farine ou base de préparations telles que « porridge », gruau et bouillie,

Les protéines provenaient des légumes secs (pois, pois chiches, lentilles et fèves) surtout utilisés en soupe.

A ce régime s'ajoutaient légumes, fruits frais et secs, œufs, olives et fromage, vin. La consommation de viande était exceptionnelle, voire rarissime dans les classes populaires.

Les romains eux, ont ajouté le pain d'épeautre, de froment , puis noir à ce régime.

Chez les plus pauvres prévalait le pain noir, il s'accompagnait du « pulmentarium » : huile, sel , vinaigre, olives et figues (les seuls fruits non réservés aux classes élevées).

Les légumes étaient consommés crus ou cuits, suivant sous huile.

Dans les premiers siècles de l'histoire romaine la consommation de viande a peu évoluée depuis les étrusques.

Sfogliatelle
Sfogliatelle
Banquet à la Renaissance
Banquet à la Renaissance
Au champs à la Renaissance
Au champs à la Renaissance

Au milieu du 18ème siècle, la péninsule compte 25 millions d'habitants dont les ¾ travaillent la terre : braccianti (journaliers), contadini (paysans) et coloni (métayers), la plus part vivant dans la misère. Le nombre incroyable de personnes mentionnées comme « poveri » ou « indigenti » dans les registres d'état civil des 18ème et 19ème siècles en témoigne, et pourtant ce sont des registres de communes toscanes, région opulente pour l'époque , comparée à d'autres provinces italiennes.

Triste constat, mis à part dans les classes aisées, la quasi-totalité de nos aïeux a consommé des aliments pauvres et en quantité insuffisante.
Acquacotta
Acquacotta


Le pain était fait à partir de farines souvent mélangée aux farines de glands, de châtaignes, de fèves. Ce pain était mis, en rondelles ou en tranches, dans les bols en bois qui accueillaient un peu d'eau chaude et de sel avec quelques gouttes d'huile , en temps de moisson cette soupe était accompagnée d'un fiasco de vin pour donner de l'"énergie".
Dans les zones de haute colline ou montagne de l'Ombrie, de la Toscane et du Latium, les pommes de terre faisaient au moins partie d'un repas quotidien, cuites sous la braise ou bouillies, assaisonnées avec un peu de sel et de poivre et mangées avec du pain de polenta.

Pour les ouvriers des usines du Nord, un pain de mauvaise qualité est l'aliment de base, puis il y a la farine de maïs pour faire la polenta; il y a très peu de pâtes, et dans certains cas, dans les zones de la plaine irriguée, le riz.
Au Centre, le pain est plus abondant avec les fougasses (schiacciate) ; au Sud, les pâtes sont en plus grande quantité qu'ailleurs, alors que ni la farine de maïs, ni le riz ne sont consommés.
Pas de viande fraîche, si ce n'est rarement, et en tout cas de qualité inférieure; le poisson est rare, tandis que le lait et les produits dérivés sont consommés en quantités dérisoires.

Risorgimento (unification de l'Italie)

Les métayers, qui font presque toujours trois repas par jour, sont les mieux lotis mais pour les journaliers souvent, seule la "polenta et l'eau" sont la base d'un repas.
Pour les ouvriers, la nourriture chaude était rare : presque toujours il s'agissait de pain dur et de mauvaise qualité, avec quelques bouchées d'ail ou d'oignon parfois trempés dans le sel rare et coûteux.
Pour les paysans, cela ne changeait guère car il n'y avait que de la polenta, alors que les moins démunis utilisaient parfois un peu de blé pour faire la soupe réservée uniquement aux jours de fête.

Polenta
Polenta
Schiacciate
Schiacciate

On est bien loin de la cuisine traditionnelle de la « nonna » !

Il faudra attendre les premières décennies du 20ème siècle pour que l'alimentation populaire s'améliore.
Fabrique de pâtes, début 20ème
Fabrique de pâtes, début 20ème

Début 20ème

À la campagne, ceux qui possèdent un peu de terre peuvent améliorer leur ordinaire non seulement pour leurs besoins domestiques, mais aussi pour gagner quelques lires et pouvoir vivre décemment.

La consommation de sucre augmente considérablement dans presque toutes les régions, notamment parmi la population urbanisée.
L'amélioration de l'alimentation doit être attribuée principalement à l'augmentation de la consommation de blé et à la diminution de la farine de maïs .
Mais ce n'est pas pour tous la fin de la "famine", on mange aussi un pain de pur froment et on utilise parfois des pâtes faites maison avec de la farine de blé, assaisonnée avec du lard de porc. La viande continue à être réservée pour les grandes occasions et ce n'est pas toujours possible ; les fruits frais, les légumes, les herbes cuites, parfois un peu de fromage ou de viande salée sont ce que l'on mange avec du pain, répartis sur un ou deux repas et le matin on mange seulement du pain.

Les pâtes alimentaires, autrefois presque exclus des repas des paysans et réservés aux plus riches ou aux jours des grandes fêtes, entrent maintenant dans la consommation ordinaire.

Les légumineuse : haricots, pois chiches, fèves fraîches ou séchées, et lentilles, sont récurrents dans l'alimentation des populations méridionales (Pouilles et Calabre), malgré le pouvoir d'achat accru dérivé des envois de fonds des émigrants.

En 1914 le pourcentage calorique d'origine animale, était de 35,54% en Angleterre, de 32,79% en Allemagne, de 26,59% en France et de seulement 12,32% en Italie.

Il faudra encore attendre l'après guerre (la deuxième) avant que le régime alimentaire des Italiens atteigne un niveau acceptable, bien que certaines couches de la population commencent à céder au  charme d'une "cuisine nouvelle plus riche et plus variée" au point de recourir, même s'ils ne sont pas aisés, aux recettes "bourgeoises" , pour beaucoup la "nourriture quotidienne", sa quantité et sa qualité sont encore un problème.

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