Jour 12

Lettre K : KREBS

... ou 50 nuances de rouge!

Les patronymes, voyage dans le temps.

De nos jours, en France, il y a environ 1, 4 millions de noms de famille ; quoi de plus naturel que de porter et transmettre un nom à l'orthographe fixée une bonne fois pour toute (la plus part du temps).

Si vous vous êtes lancés dans la grande aventure de la généalogie, vous savez qu'il n'en a pas toujours été ainsi...

Le nom romain :

il se diffuse en Gaule avec l'expansion de l'empire puis le principe du triple nom (praenomen, nomen, cognomen) disparaît avec les invasions barbares qui propagent à partir du Vème siècle les désignations germaniques uniques formés de deux éléments : Bern/ard, Ro/bert, Berth/ier, Rim/baud. Ils ne se transmettent pas d'une génération à l'autre.

Avec l'expansion du christianisme les noms chrétiens prennent le pas sur les noms d'origine germanique ou latine, les personnes prenant généralement des noms universels de saints.

A partir du Xème siècle :

se développe l'habitude d'accoler prénom et patronyme : en cause l’essor démographique et la plus grande mobilité des populations qui rendent nécessaire de distinguer les homonymes, devenus trop nombreux.

On ajoute des surnoms, souvent très personnalisés (surnoms tenant à leur lieu d'origine, à leur métier ou, le plus commode, des sobriquets relatifs à une particularité physique ou morale.

Alors que jusque là la liberté de changer de nom prédomine, au Moyen Âge naît la coutume de la transmission du nom par filiation et son usage répété et consacré par le temps lui donne un caractère juridique obligatoire.

A partir du XIVème siècle :

le phénomène des noms de famille héréditaires s'étend à toute la population, les différentes personnes portant le même nom sont désormais distinguées en leur associant un surnom (nom attribué) ou un pseudonyme (nom choisi).

Les anthroponymes français se répartissent alors en plusieurs types de noms :

d'anciens prénoms de baptême : Nicolas...
de professions : Meunier, Maréchal, Boulanger...
de sobriquets et surnoms de toutes sortes liés à l'apparence physique (Roux, Brun, Borgne...), aux traits de caractères (Lesage)
de lieux géographiques : Dupont (habitant près d'un pont), Dupré
de plantes, d'arbres, d'animaux...
du rang social...

En 1474, Louis XI interdit d'en changer sans autorisation royale. Puis, en 1539, François Ier rend obligatoires les registres de baptême, de mariage et de décès, mais comme les curés transcrivent les noms phonétiquement et que l'illettrisme prévaut, leur orthographe reste aléatoire.

Après la révolution :

Il faudra attendre 1794 pour que tous doivent porter le nom et prénom inscrits à l'état civil et 1877 pour que l'orthographe en soit fixée dans les livrets de famille.

De KREBS à GREVISSE

une enseigne

Vous l'aurez compris, les noms ont évolué au cours des siècles. Il y a de très nombreuses variantes orthographiques d'un nom : les patronymes évoluent d'un acte à un autre, selon la personne qui l'écrit (connaissance du nom...), selon la prononciation...

Jean KREBS est né avant 1610 à Rohrbach les Bitche en Moselle où il épouse Anne Jung vers 1639, il est maître charpentier. C'est d'ailleurs dans son domaine professionnel (marché, ordre et quittance) que je trouve la première variante de son patronyme : Jean KROBS.

"... Le Général major du bataillon, Gouverneur du comté de Bitche, avec l'assistance du Commissaire Général de la Garnison de son Altesse, fait marché audit Jean KROBS pour raccommoder ce qui reste de la charpente de la tour qui est au quartier dit de son Altesse au château de ce lieu de Bitche, faire un pont-levis à la porte du dit château et une porte au magasin où se met le bois, moyennant le prix de 19 reisdaller. «

Son fils Jean Théobald naîtra à Bining vers 1642 et épousera Elisabeth RIMLINGER vers 1686. De ce couple est issu Jean Nicolas en 1684. Il est berger et vit à Gros-Réderching.

A ce moment les choses se compliquent,,,,mes KREBS disparaissent ! Plus aucune trace de cette lignée : mariage, décès, Jean Nicolas s'est volatilisé.

Comme Il ne faut pas s'arrêter à une orthographe, je recherche des orthographes approchantes. Toujours rien.

Peut-être que connaître l'origine du patronyme m'aiderait ? Elle donne souvent quelques informations sur l'origine de nos ancêtres (origine géographique, origine sociale, métiers...).

Kreps : Nom mosellan assez rare, variante probable de l'allemand Krebs (= écrevisse), surnom donné à un pêcheur d'écrevisses ou à celui qui est rouge comme une écrevisse (M.T. Morlet envisage aussi un surnom lié à l'enseigne d'une maison). Le nom de famille Krebs est fréquent en Moselle. Dérivé : Krebser.

Ecrevisse, pourquoi pas ?

Nom porté en Alsace-Lorraine (variantes Grevis, Grevisse). Renvoie à l'écrevisse (ancien haut allemand krebiz, allemand Krebs). Il peut s'agir d'un sobriquet métaphorique (rouge comme une écrevisse) ou bien du surnom métonymique d'un pêcheur d'écrevisses, ou encore d'un nom d'enseigne.

Et c'est bien sous le nom de GREVISSE que réapparaissent mes KREBS vers 1729, à l'occasion de la naissance de Louis, fils de Jean Nicolas et Marie Catherine Jax.

Leur petit-fils, Jean -Georges s'appellera LEGREVISSE sur son acte décès en 1812 en Meurthe et Moselle alors que la fille de celui-ci, Élisabeth, apparaît sous le patronyme de GREVILLE sur certains actes.

Si vous êtes bloqués sur un nom

Il n'y a pas d'orthographe précise en ce qui concerne les patronymes, jusqu'à récemment, donc :

Pensez à la phonétique !

Attention aux particules, au Le qui apparaît et disparaît : delacroix, de la Croix, lacroix, lacroix, Croix...

Le patronyme d'une personne peut aussi apparaître soit en français soit dans la langue régionale, preuve en est faite avec les KREBS.

Renseignez-vous sur l'origine du nom (sur Geneanet , par exemple).

Soyez patients, il est parfois fructueux de laisser une branche en attente quelques mois et d' y revenir avec un regard neuf, au gré d'une lecture ou d'une intuition (à vérifier).